Gérer un traumatisme
- Lise Philippe
- 18 oct.
- 7 min de lecture
Du grec "trauma", qui signifie "blessure".
Un traumatisme est une atteinte subite et violente portée à l'intégrité physique ou psychologique d'une personne.
Deux grands types de traumatismes :
Traumatisme physique : C'est une lésion du corps causée par une force extérieure (agression, choc, chute, accident, blessure, etc.).
Traumatisme psychique (ou psychologique) : C'est une expérience émotionnelle intense et souvent soudaine, qui dépasse les capacités de la personne à y faire face sur le moment. Cela peut laisser des séquelles durables.
Et nous allons voir au fil de cette réflexion que le corps et l'esprit étant lié, un choc physique aura des répercussions sur le mental et un traumatisme psychique aura également des répercussions sur le corps.
Partons tout d'abord de constats factuels et facilement vérifiables:
En France aujourd'hui,
il y a de plus en plus d'enfants déclarés TDAH
augmentation des suicides et idées suicidaires et fait récent, aussi chez les enfants parfois même très jeunes
augmentation de la consommation de stupéfiants et d'alcool
augmentation du stress de manière globale dans la population générale
perte de sens pour la vie, pour le travail, pour les études
système de santé et d'éducation en déliquescence
.... liste non exhaustive
Le traumatisme est une menace (sur l'instant et aussi peut être même surtout dans l'après ) face à laquelle généralement, nous ne savons pas quoi faire ni comment la gérer.
Ce n'est pas tant le mal (par exemple lors d'un choc physique) qui nous arrive, mais ce qu'il se passe en nous lorsque cela arrive.
A la base, le traumatisme est une déconnexion de Soi. Car cela fait tellement (trop!) mal, qu'il faut se mettre en sécurité pour continuer à vivre. Cela peut devenir si on ne s'en occupe pas, une dynamique de vie: on ne parvient plus à gérer ses états internes et ses émotions, nous portons des masques pour faire bonne figure et essayer de continuer malgré tout, mais cela peut conduire à de véritables drames.
Nous pouvons ainsi avoir comme réflexes, de couper les relations dès que nous avons un peu mal, couper tout de suite pour ne pas avoir à ressentir ces émotions que nous avons enfouies et dont nous ne savons pas quoi faire. Le risque aussi dans ce cas de figure, c'est de ne pas nous fier à nos intuitions, à nos ressentis (toujours pour ne pas avoir à affronter ces émotions dont nous ne savons absolument pas quoi faire et qui font trop souffrir).
Le traumatisme affecte également le cerveau.
Pour rappel, le cerveau est un merveilleux outil qui nous maintient en mode survie, nous protège lors d'évènements graves. Cela fonctionne comme un bouton rouge sur lequel on appuie lorsqu'il y a un danger.
Le phénomène de la dissociation en est un exemple criant et concret: pour se protéger de la douleur nous nous dissocions, c'est comme si le corps se séparait de notre mental, pour se détacher de la douleur, ne plus la sentir et surtout nous mettre en sécurité.
Le traumatisme va affecter certains circuits cérébraux et neuronaux importants en rapport avec la façon dont nous réagissons, dont nous nous comportons, dont nous interagissons avec les autres, comment nous gérons le stress, nos interactions avec le monde, notre degrés d'empathie, de perspicacité, de compassion que nous avons. Toutes ces choses énumérées et bien d'autres encore sont remises en question, sont restreintes et limitées par le traumatisme.
De nombreuses études scientifiques ont prouvées tous ces phénomènes.
Chez un enfant (en plein stade de développement) traumatisé, le cerveau n'est pas le même que celui d'un enfant n'ayant vécu aucun traumatisme.
Pour créer un traumatisme, il ne suffit pas de grands chocs.
Par exemple un enfant élevé par des parents eux-mêmes éloignés de leurs propres instincts, laissé seul en train de pleurer sans le prendre dans les bras quand ce même enfant a désespérément besoin de sécurité, besoin d'une relation, cela suffit à créer un traumatisme!
(Nous pouvons aller voir pour cela du côté de l'épigénétique).
pour continuer l'exemple de cet enfant en train de pleurer laissé seul par ses parents va intégrer la peur de l'abandon. Ce qui peut, si cela n'est pas travaillé avec un bon thérapeute construire un adulte qui a constamment peur de l'abandon et qui va dans ses relations avoir différents types de comportements: soit tout faire pour les autres, tout ce qu'ils souhaitent pour ne pas être abandonné, soit entretenir des relations vouées à l'échec qui vont venir valider sa peur d'être abandonné ("puisque cela arrivera de toute façon"), soit créer exactement sa peur et s'abandonner soi-même.
Vous avez certainement entendu parler du concept du "mouton noir"?
Dans une famille, dans une équipe, dans une classe (...) le "mouton noir" est la personne qui encaisse les choses + que les autres, toute la douleur et le stress de la famille, de l'équipe, de la classe (...). Et quand ce "mouton noir" parle, manifeste, dénonce, les autres ne supportent plus de le voir, ils ne sont pas en capacité de voir, d'entendre, ils se désolidarisent de leur propres douleurs, de leur propre stress.
En tant qu'enfant, nous avons 2 besoins fondamentaux:
l'attachement: ABSOLU & NON NEGOCIABLE
l'authenticité: le lien avec nous-même car sans l'authenticité (la vérité), sans lien avec nos instincts/nos ressentis, combien de temps sommes nous capables de survivre dans la nature?
! Ces deux besoins sont une nécessité vitale pour tout être humain !
Nous évoluons dans une société qui pourtant prétend se préoccuper de la santé mentale et du bien être de ses compatriotes ne supporte pas la colère!
On apprend aux enfants dès le plus jeune âge à mettre la colère de côté et on met symboliquement l'enfant en colère de côté, on l'écarte, on lui apprend à se déconnecter de lui-même. Et c'est là précisément la porte ouverte aux troubles mentaux et aux maladies physiques (ce que la personne ne peut exprimer, va s'imprimer dans le corps et au mieux somatiser doucement au fil des années voire muter en maladie parfois très grave).
Si on apprenait à un enfant comment gérer sa colère, l'aider à traverser cette émotion et devenir ami avec elle, vous l'aurez compris nous réglerions pas mal de problèmes.
Le traumatisme et ce qu'il a induit: dissociation, dépression, consommation de stupéfiants, dépendances, idées suicidaires etc. est un succès (contrairement à ce que notre société veut nous faire croire), car il nous permet d'aller voir en nous, d'aller au plus profond de nous-même, d'apprendre à savoir comment nous fonctionnons et réagissons et aussi parfois (souvent, hélas) comment je suis capable de m'abandonner moi-même.
Plutôt que de chercher d'où vient la dépendance, il est bien plus intéressant de répondre à la question: d'où vient la douleur?
Prenons un exemple: mon enfant vit une agression grave, et je ne parviens pas en tant que parent à gérer la situation et continuer d'avancer et de fonctionner comme auparavant (au travail, dans la vie, je perds le sens, je suis en colère etc;), quelle est la douleur? Peut-être que la douleur est que moi-même en tant qu'enfant je n'ai pas été protégé par mes parents et que dans cet évènement là, (même si je n'y suis pour rien dans l'agression de mon enfant/je ne l'ai bien entendu pas souhaité), je ressens/ j'ai l'impression que je n'ai pas su protéger mon enfant alors que c'était mon devoir.
Notre société dite moderne selon Gabor Maté (médecin généraliste au départ, qui a travaillé pendant des années avec des personnes toxicomanes, sans-abri, ou atteintes du SIDA, notamment dans le quartier défavorisé de Vancouver (Downtown Eastside). repose sur 2 mythes (croyances) forts:
que la dépendance est un choix, que les décisions qui en découlent sont une question de culpabilité individuelle = ce qui entraîne à punir les dépendants pour leur(s) dépendance(s)
l'hérédité, que c'est une maladie héréditaire, un trouble biologique du cerveau = la personne n'est pas responsable
Selon Gabor, ces deux mythes sont faux ! la cause de la dépendance c'est que lorsque les personnes souffrent, elles veulent simplement échapper à leur(s) douleur(s), rien de plus normal! "Quand on prend les gens là où ils sont et qu'on les traite comme des êtres humains, que l'on essaie pas de les changer, on ouvre la possibilité d'une transformation".
"La dépendance est en fait une réponse, mieux encore: une solution à un problème".
Ainsi, un traumatisme s'accompagne avec beaucoup de douceur, de bienveillance et de tact. Il est primordial d'écouter la personne, d'être à ses côtés, qu'elle se sente en complète sécurité et de ne surtout pas la juger, vouloir la changer, ni changer sa propre conscience et la conscience qu'elle a de son état, de son expérience, de son traumatisme.
Nous l'avons vu et expérimenté ces dernières années en particulier, le paradigme médical dit "moderne" dans la pratique sépare l'esprit du corps et il sépare l'individu de l'environnement. Le problème fondamental est la capitalisme, le matérialisme: tant que le recherche et la gestion de la "santé" sera motivée par les bénéfices des sociétés pharmaceutiques, qu'est ce qui motivera l'éducation des médecins si ce n'est la recherche du profit des sociétés pharmaceutiques?
"Dans ce système, les personnes sont considérés comme des automates, comme des êtres sans réels besoins émotionnels et spirituels. Au fur et à mesure que la mondialisation et le matérialisme se répandent dans le monde, les maladies auto-immunes se propagent aussi dans des sociétés qui les connaissaient à peine auparavant". J'ajoute à ce que dit Gabor Maté: les maladies mentales aussi se propagent.
Or, les maladies qu'elles soient mentales ou physiques sont des réponses NORMALES à des circonstances anormales, et ce qui est considéré comme normal dans notre société est souvent insensé!
Lorsque le traumatisme arrive (tout comme la maladie), nous pouvons le voir comme un ennemi à combattre ou le considérer comme tel, étant là et se demander quel est l'enseignement? Qu'est ce qu'il signifie? Qu'est ce que cela m'apprend?
Dans ce processus de guérison comprendre ce que cela veut dire, pourquoi cela arrive, les impacts sur ma vie, sur mes relations et en particulier, sur la façon dont je me traite?
Les médicaments sont des béquilles, des pansements qui aident à tenir mais sans se poser ces questions, on n'atteint pas le fond du problème.
C'est par un processus dynamique et émergeant de confrontation avec la vérité que les solutions surgissent. L'énergie du traumatisme peut-être transformée en énergie de vie!


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